mardi 18 juillet 2017

Amazing Adventures #1, juin 1961

Un scientifique, Paul Ramsay, raconte son aventure. Jugé pour le meurtre de son collègue John Carter (aucun rapport avec Edgar Rice Burroughs), il refuse, malgré les exhortations du juge, d'ajouter quoi que ce soit à son témoignage, hormis le fait d'admettre le meurtre. Pendant l'intervention de l'avocat général, il repense au passé et à la vérité qu'il ne se sent pas le droit dire.

FLASHBACK: dans une zone montagneuse, lui et Carter scrutent les profondeurs de l'espace grâce à leur nouveau radiotélescope. Un jour, Ramsay détecte ce qu'il croit être une comète. Il s'agit en réalité d'un vaisseau spatial se dirigeant vers eux grâce aux signaux émis par leurs appareils. Carter se demande alors ce qui va se produire si l'entité à bord de l'astronef est de nature hostile. Le vaisseau se pose (de façon assez conventionnelle) à proximité de leurs installations.

À l'ouverture du sas de l'engin, un être ne présentant que des ressemblances superficielles avec nous se livre à la vue des deux hommes qui s'exclament: "C'est un monstre!" Ici, le récit peut suivre deux voies: soit l'extra-terrestre n'est pas hostile malgré son apparence. Dans ce cas, le thème de l'histoire pourrait traiter de nos préjugés face à l'inconnu. La couverture du numéro est d'ailleurs ambiguë: rien ne montre de façon irréfutable que Torr (puisqu'il s'agit de son nom) est une menace. C'est l'autre voie qui est retenue: Torr est effectivement hostile. Après avoir investi leur laboratoire, Torr communique avec les deux hommes par télépathie (bien commode, semble-t-il, pour franchir la barrière de la langue). Il ignore quel est ce monde sur lequel il vient de se poser (en fait, on ne connaît pas non plus la raison initiale de son déplacement dans l'espace) mais, constatant que son atmosphère est compatible avec son organisme est que ses autochtones lui sont "inférieurs", décide que la Terre fera un bon "satellite" de sa civilisation. Pourquoi ne dit-il pas "colonie", tout bêtement? Parce que ça sonne moins "science-fiction"?... 

Ramsay tente d'abattre Torr (au nom de toute la Terre, pas seulement de l'American Way of Life!), en pure perte. Celui-ci s'empare des deux scientifiques et les enferme dans une grotte située non loin de leur radiotélescope. Ici se termine la première partie de l'histoire. À mon sens, c'est dans la deuxième partie que se trouvent les développements les plus intéressants. Torr procède à un échange de personnalités entre lui et Carter. Plus précisément: Torr fait en sorte de se retrouver dans le corps de Carter tandis que ce dernier se retrouve dans le corps de Torr, à ceci près que, désormais, Torr/Carter continue de garder le contrôle sur son corps d'origine, réduisant ainsi à l'impuissance la personnalité de Carter.

Je reviendrai bientôt sur la suite de cette histoire moins naïve qu'on pourrait le penser. À ce stade du récit, je peux tout de même souligner qu'en pleine guerre froide, l'échange auquel il est procédé est une variation sur le thème du candidat mandchou, c'est-à-dire de l'agent dormant, conditionné. L'ennemi auquel on ne s'attend pas. The Manchurian Candidate est un roman de Richard Condon adapté au cinéma par John Frankenheimer, en 1962, et en 2004 par Jonathan Demme. La série Homeland est aussi une exploration de ce type d'intrigue. Car ce qu'il faut bien voir, c'est que dès l'instant où Torr se meut par le truchement de Carter (afin, dans un premier temps, de ne pas effrayer les Terriens et, ainsi, de mieux les étudier), le corps de Torr n'a plus vraiment d'intérêt d'un point de vue dramatique. Il s'agit avant tout d'un ressort permettant de jouer sur la paranoïa de l'époque. Le sympathique Carter est un traître! C'est-à-dire: méfiance, nos voisins travaillent peut-être pour l'ennemi. Le vrai visage de ce dernier, en définitive, n'est pas tellement celui de Torr mais celui de Carter, grimaçant, déformé par ses intentions maléfiques. La substitution à laquelle nous assistons dans la grotte peut aussi être considéré comme une métaphore du pouvoir de l'enfumage propagandiste. Cela ressemble d'ailleurs plus à une opération de magie qu'à une opération scientifique. 

Il reste, à mon sens, encore des choses à dire autour de cette histoire déployée sur treize planches. Encore une fois, j'ai l'intention d'y revenir mais d'ores et déjà, un point non négligeable: l'intégralité d'Amazing Adventures #1 est disponible, au format numérique, ici.

TO BE CONTINUED HERE

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